Alma (Prologues)

Joignant ses mains en arc, le menton lourd, seule accoudée à cette grande table, la jeune princesse Parisi laisse échapper un soupir : non, je n’ai pas faim. Le pouvoir ronge le ventre, gratte aux parois de l’estomac. Ça remplace toute nourriture. Alma se contente d’eau — De la belle carafe cristal, du verre en longues gorgées jusqu’aux muqueuses, dans le silence de la grande salle vide en plein midi.

Les dossiers s’arcboutent aux portes closes, poussent au faîte du palais ; ils sont là, ils pèsent et, lorsqu’Alma sortira de cette pièce, qu’elle croisera le regard du Protocole, entendra le nom de chaque rendez-vous — Et les doléances du peuple, et la prose bien apprise des lobbies — Alma devra tout contenir, s’en faire une armure, penser à Méridien, son père ; penser à Monomachine, aussi ; être une Parisi plus forte.

La salle-à-manger demeure fraîche malgré l’écrasante chaleur du dehors. Alma passe la plante de ses pieds nus contre les belles dalles du sol ; peut-être devra-t-elle condamner quelqu’un avant ce soir. Le corps publique est une étrange maladie, se dit-elle alors : il absorbe le corps privé, le soi et […]

Ce texte n'est disponible qu'au format imprimé. Outre que cela ne ferait certainement pas plaisir à l'éditeur, un texte édité est toujours plus intéressant que la matière brute sortie de la tête de son auteur. Plus propre. Purgée de toute coquille.