Jaz 8

Les bureaucrates sentent d’une certaine manière que le monde n’est pas "normal" qu’on saura pourquoi le réel se dégrade ; une opinion érigée en certitude chez M&O, partagée à chaque retour de mission dans l’étroite antichambre stérile judicieusement située à la sortie des ascenseurs — le junior remarque très justement que ça ne fait aucun sens de laisser les expéditions contaminer l’ascenseur ; Jaz estime qu’il s’agit plus d’un décor que de mesures sanitaires.
—C’est nous, la partie "Observations", aime blaguer l’un des docs et l’humour arrive toujours avec le minutage précis du réflexe : désinfection des mains, latex, ajustement de lunettes ; blague. Le junior adhère sincèrement, il serait déplacé de lui montrer les coutures du faux.
Ainsi voilà Jaz et le junior alignés côte à côte (une expédition à la fois) seulement séparés par ce tissu bleu-vert d’hôpital, assis à un mètre du sol sur des tables grinçantes, l’œil vissé sur le dossier d’habilitation, le carnet des prises de sang et ses petites étiquettes collées. On surveille les doses, explique le doc au junior : les radiations sont plus fortes en-dehors de Lutecia ; vous savez ça, j’imagine (le junior doit opiner, si on se fie aux plaintes de l’inox ).
—On devrait arrêter les saignées, doc, se plaint Jaz.
—C’est le protocole.
—J’ai eu une prise sang hier.
—C’est le protocole.
Le médecin déballe une seringue propre, passe derrière le rideau :
— Hé kid, dis, toi aussi tu fricotes avec la Phalange ?
(silence)
—C’est ok, tu peux me répondre, je ne suis pas un mouchard.
Jaz pivote à son tour, renvoie vers le rideau : tu peux lui répondre.
La voix nous arrive un […]

Ce texte n'est disponible qu'au format imprimé. Outre que cela ne ferait certainement pas plaisir à l'éditeur, un texte édité est toujours plus intéressant que la matière brute sortie de la tête de son auteur. Plus propre. Purgée de toute coquille.