Sur l’Ouest, chez Sarah, une fillette joue dans la salle de bains. Sarah ne la voit pas. Si elle cherchait seulement à l’attraper, la gamine serait dissoute. Sarah n’entend que ce rire, des jeux. Un chant marin. Elle aussi ; cette enfant, ce parfait fantôme, porte dans ses veines le sang d’Érébus.

Le mot exact n’est pas “projection”, mais son intelligence est prise de court. Sarah refuse tout d’abord de rentrer à Paris. L’image de la clinique Easton domine son imagination de ces colonnes massives, technologiquement pures ; les salles blanches, les outils dédiés à la microchirurgie synthétique ; le lobby aéré infiniment design, digne de ces compagnies prospères et omnipotentes. Easton ? Sarah refuse. Elle devrait les appeler, selon Hygin. Nous parlons ici de double contrainte.

Pendant tout ce temps, la fillette ouvre et referme les robinets, asperge la cabine de douche et s’amuse beaucoup, s’ingénie à faire clapoter l’eau. Sarah essaie de comprendre quelles routines contrôle ces projections. Elle échoue.

Sarah tergiverse plusieurs semaines. Prendre rendez-vous, c’est capituler. Pire : ouvrir la porte aux hallucinations nouvelles, aux gargouilles moyenâgeuses descendues des églises, gueules ouvertes bavant des eaux de pluie ; c’est abattre les dernières murailles de la raison, voir les fuites devenir brèches et toute défense céder. Sarah redoute […]

Oh, mais, pourquoi couper ? Pourquoi si peu ? Pourquoi se contenter d'un avant-goût, hein, pourquoi ? Abonnez-vous et recevez à la carte les fragments de ce texte !