Érébus serre sa fille contre lui : cela n’arrive que rarement. Non par manque d’amour mais d’excès de manières, de distance. Érébus transmet ainsi une certaine part de cette neutralité, de cette économie de gestes. Volontairement. Distillée avec les années ; plus la suite discontinue des événements que le temps homogène. Par habitude aussi, par connivence des gestes. Sarah ne se formalise pas. Érébus est un être voilé de pénombre ; ses expressions obstinent en dureté sur les lignes abruptes des os crâniens. Élancé comme sec, l’allure aride des personnes marquées par un douloureux exode. Sarah connaît tout cela. Érébus a porté toute sa vie l’empreinte des époques dures et la qualité de réfugié partout ; Érébus a changé aux frontières. Sarah le sait. Son père a projeté sur elle un passé, un héritage. La disparition de sa mère, très récente, introduit un peu de gène dans le mélange.

Les étreintes comme celles-ci sont rares.

Nous sommes témoins d’un événement cosmique. Quand il la libère, il dit doucement :

« Nous allons aujourd’hui à la clinique, tu le sais ? »

Oh, mais, pourquoi couper ? Pourquoi si peu ? Pourquoi se contenter d'un avant-goût, hein, pourquoi ? Abonnez-vous et recevez à la carte les fragments de ce texte !