“Dans les contes de mon enfance, les valkyries avaient toutes le visage de ma mère. J’imagine qu’il était naturelle pour une petite fille à la fois d’idéaliser sa mère et de regarder vers le ciel. Aucun personnage des contes que je lisais alors n’était parfait ; ils étaient tous empêtrés dans les sentiments humains les plus bas : cruauté, jalousie, lâcheté. Cela ne m’empêchait pas de les aimer, dans leurs affres et dans leurs efforts pour dépasser ces pulsions, d’autant que les dieux témoignaient des mêmes afflictions ; mais je n’en aimais que davantage les valkyries. Elles m’ont longtemps tourmentée : je passais des après-midi entières à répertorier les échos de leurs existences dans les masses éparses et diffuses des contes de mon peuple ; mais je n’y trouvai rien de convaincant ; je me souviens avoir tenu un carnet, secret évidemment, où je listais les évocations de chaque valkyrie, m’interrogeant sur leurs similitudes, décidant avec tout l’arbitraire de l’enfance que tel et tel nom désignaient la même héroïne ; néanmoins, elles demeurèrent un mystère. Je ne parvenais à trancher si les valkyries se rangeaient du côté des humains élevés au rang de dieux ou du côté des dieux purs — Quelles étaient leurs origines ? Les conteurs le savaient-ils réellement ? J’ai détesté, avant d’apprendre à l’aimer, la porosité et les contradictions de la mythologie enveloppant ces contes. Je finis par arbitrer : ces femmes chevauchant les cieux, survolant les champs de bataille, choisissant qui mourrait et qui s’élèverait au rang de héros, ne pouvaient être ni mortelles, ni inhumaines ; trop parfaites pour être des dieux ou des humains, les valkyries relevaient d’un autre plan, allant et venant entre le plan des dieux et celui des humains pour tisser la tapisserie de leurs destinées respectives. Ainsi, je pus enfin imaginer les valkyries en action, les regards inquiets de combattants ensanglantés tournés vers le ciel, ce même ciel qui s’entre-déchirait pour laisser passer les silhouettes de cavalières irréelles — des héroïnes de contes dans le […]

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