“Pourquoi ton ami Zacharie laisse-t-il faire cela ?” Callisto, relevant la tête, suivit le regard de l’indienne : Cassien, dégoulinant et nu comme un nouveau-né, sortait de l’eau, l’air furibond, ses habits détrempés et roulés en boule entre ses mains. Le métis les dépassa sans précaution et sans un regard, écorchant la plante de ses pieds sur les rochers ; Thècle l’interpella d’une voix douce, comme si elle voulait s’excuser pour le comportement des autres, mais il l’ignora et s’enfonça dans les sous-bois. Callisto se força à trouver une excuse pour justifier le comportement complice de Zacharie : “C’est la vie… C’est comme ça depuis le premier jour. Zacharie n’y peut rien. Il accepte la loi du groupe. On nous a appris à respecter la loi de notre groupe. C’est… OK, c’est dégueulasse, injuste… mais la guerre est injuste, notre monde est injuste. Que veux-tu y faire ?” Elles avaient déjà eu de telles discussions, en un temps où Callisto partageait encore les convictions de Zacharie, un temps qui lui paraissait tellement lointain. Elle chercha à capter le regard de l’indienne, à comprendre ce que son amie attendait comme réponse. [Son amie… Hateya était-elle ce qu’on pouvait appeler une amie ? Elle serait celle qui lui manquerait le plus mais, à bien peser la question, au bout de toutes ces années de vie commune, Callisto avait-elle noué de véritables liens d’amitié ? Non. Elle avait mis le temps à accepter la vérité. Tout était faux, faussé — tout le temps. Elle n’avait eu que des substituts d’amis : Zacharie, Zoé, Hateya et… Silas. Même le nom de Silas ne lui venait plus en premier.] “C’est votre civilisation qui est dégueulasse.” L’indienne exprimait rarement son ressentiment, mais la haine transpirait de sa voix sans trembler. “C’est la tienne aussi, Haté. Il va falloir que tu t’y fasses un jour… Excuse-les, ce n’est qu’un jeu et ce ne sont que de grands enfants.” // “Tout n’est qu’un jeu pour vous. [Regard dur, âpre, sans concession] Les champs de bataille, nos apprentissages, cette virée secrète sur la péninsule. Nous ne devrions pas nous comporter ainsi. Mon peuple ne se comportait pas ainsi.” Que savait-elle de son peuple ? Elle qui était une orpheline, une bâtarde, père miwok et mère séminole (le grand écart), tous deux adoptés comme tant d’amérindiens à l’époque où, avant la guerre, les familles bourgeoises […]

Oh, mais, pourquoi couper ? Pourquoi si peu ? Pourquoi se contenter d'un avant-goût, hein, pourquoi ? Abonnez-vous et recevez à la carte les fragments de ce texte !