La lumière angélique d’une fin d’après-midi en Arcadie baignait la façade ocre du manoir, effaçant les cicatrices du temps, la fièvre du solstice contenue par des vents vespéraux s’engouffrant et virevoltant dans les vastes espaces du jardin. De l’éclat primitif qui blanchissait les murs, tout reprenait vie, tous les souvenirs d’enfance que Pallas avait partagés avec elle : les rangées de roses dessinant le blason familial au milieu des jardins, les cousins courant dans les allées, jouant au loup, les servantes tirant l’eau du puits, l’eau domaniale, la même eau que celle du lac où se reflétait jadis le fronton du manoir, ce lac où les mêmes enfants s’égaraient en baignades et en jeux, se projetant dans un avenir lumineux, sous le regard sévère et juste du dieu statufié en son centre ; elle vit aussi le père de Pallas, ses oncles, leurs chiens dressés pour la chasse, s’élancer dans la forêt, vaillants et sans crainte // un nuage fin, presque un voile, passa devant le soleil // et la princesse louve se trouva à nouveau face aux friches répugnantes du jardin empoisonné, face aux murs abandonnés à la merci des intempéries ; elle vit les ombres des domestiques fuir du domaine les unes après les autres, la tête basse, elle vit une servante se morfondre devant la sécheresse du puits ; elle frissonna devant l’imposante silhouette du père de Pallas menaçant les militaires venus réquisitionner les lieux, elle le vit finir par céder, honteusement, fuyant le regard de son fils ; elle partagea le sort de la mère de Pallas, fantôme se jetant inlassablement du haut du pigeonnier. La princesse se releva. Le temps du changement arrivait, une nouvelle fois. Délaissant le masque de loup posé sur les marches de la salle à manger, elle traversa le jardin, empruntant instinctivement ses allées désuètes — comme si elle craignait d’abîmer les fleurs du passé. Elle arriva devant la vierge, attachée au chapiteau du puits. Ils la sacrifierait demain à la déesse chasseresse pour sceller […]

Oh, mais, pourquoi couper ? Pourquoi si peu ? Pourquoi se contenter d'un avant-goût, hein, pourquoi ? Abonnez-vous et recevez à la carte les fragments de ce texte !